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«  Le matériel n’est pas vétuste, mais il vieillit » : Anne-Sophie, répond à vos questions sur nos matériels roulants

Suppression de trains, trains courts, climatisation.. Direction les coulisses d'un Technicentre de la Ligne C pour y voir plus clair.

Aujourd’hui, je vous propose une immersion dans les coulisses du technicentre des Ardoines, là où sont entretenues une grande partie des rames du RER C.

J’ai rencontré Anne-Sophie, directrice adjointe du technicentre, pour lui poser vos questions.
Elle nous a parlé sans filtre du matériel vieillissant, du manque de pièces, des suppressions, du chauffage en hiver… et de tout ce qui se joue à l’atelier, loin des quais.

D’ailleurs, pour ceux qui ne connaissent pas, le technicentre est le lieu où l’on réalise la majorité de la maintenance des rames de la ligne C.

sommaire

➡️ Ce qu’il faut retenir de l’interview

Vos questions et ses réponses

Les causes des suppressions et des pannes

Un matériel vieillissant… mais pas vétuste

Louise – Beaucoup de contributeurs comme Pascale, Karim, Maurice ou Édouard me demandent pourquoi il y a autant de suppressions ces derniers temps. Est-ce que c’est un problème de vétusté, de personnel, ou de pièces ?

Anne-Sophie – C’est multifactoriel. Le matériel n’est pas vétuste, mais il vieillit : certaines rames ont plus de 40 ans. Comme une voiture, même bien entretenue, une rame de 15 ans est moins fiable qu’une rame neuve.
Mais il y a aussi un autre facteur : les maintenances lourdes tous les six ans. Une rame doit être arrêtée deux semaines, jour et nuit, pour passer en atelier. Et si on dépasse l’échéance (ce qu’on appelle la “butée kilométrique” ou “butée temps”) la rame n’a plus le droit de circuler. C’est une règle de sécurité, et on ne peut pas y déroger.

Louise – Donc c’est d’abord une question de sécurité avant tout.

Anne-Sophie – Oui. Mais quand plusieurs rames arrivent en même temps à leur échéance, on doit faire des choix. Et ça peut entraîner un effet domino : plus de rames immobilisées, donc moins de trains en circulation.
Et ce n’est pas juste un sujet de personnel. C’est aussi une question de place. On a 9 voies d’atelier : si elles sont toutes occupées, même avec assez d’agents, on ne peut pas faire plus.
La maintenance préventive, c’est une mécanique de précision, un équilibre entre moyens humains, matériels, et capacités techniques.

Des pièces détachées parfois introuvables

Louise – Et côté pièces détachées, est-ce que vous êtes confrontés à des difficultés d’approvisionnement ?

Anne-Sophie – Oui, clairement. On a dû mettre en place un plan de redressement, notamment en vue des Jeux Olympiques. Depuis, ça va un peu mieux, même si les prix des matériaux ont flambé, et certains fournisseurs restent encore fragiles.

Louise – Vous travaillez en flux tendu ?

Anne-Sophie – Oui. On ne peut pas stocker toutes les pièces, ça coûte trop cher. Et parfois, une pièce reste 10 ans dans le stock sans jamais servir… jusqu’au jour où elle devient inutilisable. C’est un équilibre délicat.
Et il y a des pièces qu’on n’a tout simplement plus : parce qu’elles ne cassent jamais, ou parce que le fournisseur d’origine n’existe plus. Là, on doit requalifier une nouvelle pièce, la faire valider par l’ingénierie, et ça peut prendre énormément de temps.

Louise – Donc ce sont des retards qui s’accumulent.

Anne-Sophie – C’est ça. Ce ne sont pas des pannes énormes, mais une accumulation de petits grains de sable. Un matériel qui vieillit, des pièces qu’on n’a pas, un atelier déjà plein, un agent malade… et tout à coup, on ne peut pas sortir la rame.
Et forcément, les suppressions s’enchaînent. C’est un effet boule de neige.

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La réorganisation de la maintenance

Une organisation chamboulée… mais en voie de stabilisation

Louise – Est-ce que tout ça s’est vraiment fait sentir cette année ?

Anne-Sophie – Toute l’année 2024, oui, on a été obligé d’alléger le plan de transport pendant plusieurs mois. On a immobilisé des rames volontairement, pour ne pas dépasser les fameuses butées kilométriques.
On avait du retard sur nos opérations, donc on a préféré anticiper. Deux rames arrêtées chaque semaine, ce n’est pas neutre, même si côté client, ça ne se voyait pas forcément tout de suite.

Louise – Vous avez pu sortir de cette logique ?

Anne-Sophie – Oui, on est en train. Quand je suis arrivée en octobre 2024, j’ai tout de suite vu qu’on allait droit dans le mur. Entre novembre et janvier, on a tout revu : nouveau plan de maintenance, redimensionnement de nos moyens, réorganisation totale.
On l’a fait sans filet, à marche forcée. Et franchement, ça commence à porter ses fruits.

Une mécanique de précision

Louise – Concrètement, comment se construit un planning de maintenance ?

Anne-Sophie – Là, je travaille déjà sur celui de 2026 ! On raisonne semaine par semaine. Si j’ai 52 opérations dans l’année, il me faut 52 créneaux.
Mais si un seul saute à cause d’un aléa – personnel absent, voie indisponible – ça déséquilibre tout. Il faut aussi intégrer la fréquence de chaque opération : certaines tous les six ans, d’autres tous les 18 mois, d’autres encore tous les 37 jours !

Louise – Et en termes de durée ?

Anne-Sophie – Ça va de 3 heures à 10 jours. L’opération des six ans, par exemple, dure deux semaines complètes, en jour et nuit. Il faut des équipes formées, les bonnes pièces, les bons outils… et pas d’imprévu.
C’est pour ça qu’en 2025, on est encore sur le fil. Mais en 2026, ce sera plus robuste, parce qu’on aura anticipé.

Un recrutement sous tension

Louise – Tu évoquais les moyens humains. Est-ce qu’il y a aussi un problème de personnel ?

Anne-Sophie – Oui, sans aucun doute. Aujourd’hui, on a une dizaine de postes vacants sur l’établissement, tous métiers confondus. Rien qu’en mécanique, il nous manque six personnes sur une trentaine : c’est énorme.

Louise – C’est un problème de profils, ou de conditions ?

Anne-Sophie – Un peu des deux. On a du mal à trouver le bon niveau technique, et les conditions (horaires décalés, travail de nuit…) ne conviennent pas à tout le monde. Certains candidats posent tout de suite leurs limites : pas de nuit, pas de week-ends…
Et nous, on ne peut pas adapter nos besoins à chaque profil. Il faut des gens opérationnels.

Louise – A côté de ça, arrivez vous à recruter en alternance ?

Anne-Sophie – Oui, beaucoup. On a deux ou trois alternants par équipe. C’est une vraie filière de recrutement. Mais former des jeunes prend du temps, et nos agents sont déjà très sollicités. On ne peut pas avoir dix alternants à encadrer par équipe, ce serait contre-productif.

Louise – L’absentéisme joue aussi ?

Anne-Sophie – Un peu, mais ce n’est pas la cause principale. Nos équipes tiennent le coup. Il y a de la solidarité, une vraie conscience professionnelle. Certains agents d’autres technicentres viennent même nous prêter main forte quand c’est tendu.

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Des choix difficiles : trains courts et trains supprimés

Pourquoi autant de trains courts ?

Louise – Côté clients, on a beaucoup de remontées sur les trains courts, surtout en heure de pointe. Est-ce que c’est devenu une pratique courante ?

Anne-Sophie – Alors non, ce n’est pas une norme, mais je comprends que ce soit très visible. Il faut bien distinguer deux situations.
D’un côté, il y a les cas d’aléa ponctuel : une rame qui tombe en panne au dernier moment, ou une rame qui manque à l’appel. Là, on est dans l’urgence. Et plutôt que de supprimer complètement le train, on choisit de faire circuler une unité simple, un train court. Ce n’est pas idéal, mais c’est toujours mieux que rien du tout. Et de l’autre côté, il y a les trains courts qui sont intégrés dès le départ dans le plan de transport.
Et là, c’est Île-de-France Mobilités qui décide en fonction des données d’affluence : selon l’heure, la ligne, la fréquentation, du coût.

Louise – Même en heure de pointe ?

Anne-Sophie – En principe, non. Mais parfois, Île-de-France Mobilités peut faire le choix de privilégier la fréquence à la capacité : deux trains courts plutôt qu’un seul long, par exemple. C’est un arbitrage global, et ce n’est pas nous, au technicentre, qui le décidons.

Suppressions récurrentes des ZANI et BALI : mais pourquoi toujours eux ?

Louise – Autre question qu’on lit très souvent, que ce soit sur le blog ou sur les réseaux sociaux : pourquoi est-ce que ce sont toujours les trains ZANI ou BALI qui sont supprimés ?

Anne-Sophie – C’est une très bonne question. Ce qu’il faut savoir, c’est que côté technicentre, notre rôle, c’est de fournir des trains en état de marche. Si une rame n’est pas disponible, on en informe le COT (le Centre Opérationnel), et c’est eux qui décident quel train supprimer, pas nous.

Louise – Et pourquoi ça tombe toujours sur les mêmes ?

Anne-Sophie – Parce que certains trains sont identifiés comme ayant un impact logistique plus limité s’ils sont supprimés.
Par exemple, si un train part de Juvisy et revient à Juvisy, le fait de le retirer n’a pas de conséquences pour la suite de la journée. En revanche, si tu supprimes un train qui part de Juvisy et termine à Gennevilliers, et qu’il est censé repartir de Gennevilliers le lendemain matin, là tu casses toute la chaîne. Tu te retrouves sans rame au départ, et tu dois supprimer un autre train.

Louise – Donc ce sont des choix pensés pour éviter un effet boule de neige.

Anne-Sophie – Exactement. Ce sont des décisions de robustesse opérationnelle : on supprime les trains dont l’annulation perturbe le moins la production globale. Et ce sont aussi souvent des trains avec une affluence plus faible. Ce n’est pas très satisfaisant à entendre, mais c’est la réalité du terrain : quand il faut choisir, on supprime là où ça impacte le moins de monde.

Louise – Et pour être bien clairs : ce n’est pas parce que les ZANI ou les BALI sont plus fragiles ou plus souvent en panne ?

Anne-Sophie – Non, absolument pas. Ce sont des choix d’exploitation, pas des constats techniques.

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Confort à bord : chauffage, climatisation, annonces, relooking

Chauffage en hiver, clim en été : comment ça fonctionne à bord ?

Louise – Cet hiver, plusieurs clients comme Émilie ou Maurice nous ont remonté des problèmes de chauffage. Et l’été, on a souvent des questions sur la clim. Est-ce que tu peux nous expliquer comment ça marche, concrètement ?

Anne-Sophie – Oui, bien sûr. Déjà, toutes les rames sont équipées d’un système de chauffage. Et théoriquement, le conducteur peut activer ou désactiver certains éléments depuis sa cabine – comme la lumière, la clim, ou le chauffage.
Mais en pratique, il n’a pas vocation à couper ces fonctions volontairement. Il est censé vérifier que tout fonctionne au départ, mais il peut y avoir des oublis, on reste humains.

Louise – Et quand il y a une panne de chauffage, c’est toute la rame ?

Anne-Sophie – Non, très rarement. Le plus souvent, c’est une seule voiture ou remorque. Ce n’est jamais l’ensemble du train.
Mais cet hiver, on a eu du mal à traiter rapidement les pannes de confort, parce qu’on était en tension sur des pannes « fatales » – celles qui empêchent carrément une rame de rouler. Donc on a dû prioriser.

Louise – Et comment vous anticipez la prochaine saison hivernale, justement ?

Anne-Sophie – On profite des travaux d’été pour reprendre toutes les pannes de chauffage connues. Et surtout, on a désigné un agent référent spécialement dédié à ce sujet. Son objectif est clair : qu’à la rentrée, il n’y ait aucune panne de chauffage connue. Bien sûr, il y aura toujours des pannes imprévues, mais on veut repartir de zéro.

Louise – Et pour la clim ?

Anne-Sophie – La climatisation n’existe que sur une partie du parc, les rames Z20900. Les autres ne sont pas équipées.
Et pour être clair : ajouter de la clim sur une rame ancienne, ce serait extrêmement coûteux, et quasiment infaisable techniquement. Il n’y a pas la place, et ce ne serait pas amortissable.
Un nouveau matériel climatisé est prévu à l’horizon 2034, mais d’ici là, les Z2N (matériel actuel) continueront de circuler. C’est un cycle long, il faut en avoir conscience.

Annonces à bord : du grésillement au silence

Louise – Beaucoup de clients nous parlent des annonces à bord : parfois trop faibles, parfois trop fortes, parfois inaudibles ou grésillantes. Est-ce que c’est un sujet que vous suivez au technicentre ?

Anne-Sophie – Oui, complètement. C’est même un sujet très sérieux, parce qu’il touche à la sécurité. Aujourd’hui, notre référentiel dit simplement que « l’annonce doit être audible », mais c’est vague. Ce qui est audible pour toi ne l’est pas forcément pour moi.

Louise – Donc vous êtes en train de faire évoluer ça ?

Anne-Sophie – Oui. Avec l’ingénierie, on travaille à fixer un seuil en décibels. Et en parallèle, on fait un état du parc : on mesure le son avec un sonomètre, sur six points par remorque. On a fixé un seuil temporaire à 60 dB. Si c’est en dessous, on intervient.

Louise – Et si la sono est complètement HS ?

Anne-Sophie – Là, c’est non négociable. Une rame avec une sono hors service est « non safe », donc elle ne quitte pas le site tant que ce n’est pas réparé. C’est obligatoire pour l’évacuation en cas d’incident.

Du nouveau à bord : confort et relooking

Anne-Sophie – Et bonne nouvelle côté confort : on lance un relooking intérieur dès cet été. On appelle ça “l’harmonisation coloriage”.

Louise – On change les couleurs ?

Anne-Sophie – Oui, complètement. On éclaircit tout : sièges, pelliculage, barres de maintien… Les rames “Waou”, qui viennent de la ligne D, étaient jugées trop sombres.
On revient à des teintes plus claires : gris, violet, vert, avec des motifs pissenlits façon Versailles. Selon les cas, les sièges seront retapissés ou remplacés.

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L’apport des Jeux Olympiques

Louise – On a souvent entendu : « pendant les JO, tout fonctionnait, pourquoi pas le reste de l’année ? ». Tu peux nous expliquer ?

Anne-Sophie – Pendant les JO, on a suspendu toutes les opérations de maintenance préventive. Donc zéro rame arrêtée pour ça. Tout notre parc était disponible.
Et surtout, on avait une organisation exceptionnelle : pas de congés, pas de formations, très peu de réunions. Tous les encadrants étaient sur le terrain. On a même tenu des points pièces deux à trois fois par jour. Dès qu’un besoin était signalé, la pièce était livrée dans la minute.

Louise – Une sorte d’organisation de guerre.

Anne-Sophie – Oui, mais qui n’est pas tenable sur la durée. Ça coûte très cher, et on ne traite aucun sujet de fond dans ce mode-là. On ne faisait que de la production.
Cela dit, on en a profité pour régler tout un tas de petites pannes ou irritants qu’on n’a jamais le temps de traiter en période normale : des problèmes de chauffage, de confort, de portes, de bruit… Les JO ont permis ça.

Louise – Donc, plutôt que de subir, vous en avez profité.

Anne-Sophie – Exactement. Et on a tiré des enseignements qu’on garde : de nouvelles méthodes, de nouveaux réflexes. Ce sera utile pour la suite.

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L’avenir : vers un parc rénové et homogène

L’arrivée des rames du RER D : un vrai tournant pour la ligne C

Louise – Tu nous parlais de matériel vieillissant. Est-ce que l’arrivée des rames de la ligne D change vraiment la donne ?

Anne-Sophie – Carrément. Aujourd’hui, sur la ligne C, on a des rames de quatre ou six caisses. Les six caisses ont une capacité intermédiaire : plus qu’une unité simple de quatre caisses, mais moins qu’une double rame.
Pour les remplacer à capacité équivalente, il faut désormais deux rames de quatre caisses, donc une organisation complètement différente.

Louise – Et ce sont les rames de la D qui prennent le relais ?

Anne-Sophie – Oui. On récupère des rames Z20500, plus récentes (années 90), en remplacement des Z5600 (des années 70) et des Z8800. Une rame de la D reçue = une ancienne rame de la C radiée.
On a déjà six rames arrivées, une dizaine attendue d’ici fin 2025. Les Z5600, qui ne peuvent circuler que dans le sud, vont toutes disparaître d’ici 2029.
Le gros avantage, c’est qu’on gagne en souplesse : les nouvelles rames pourront circuler sur toute la ligne, nord et sud confondus.

Une simplification pour la maintenance

Louise – Et pour vous, côté technicentre, ça change quoi ?

Anne-Sophie – C’est un soulagement énorme. Aujourd’hui, on a quatre sous-séries différentes. Donc quatre types de pièces, de formations, de documents, de cycles de maintenance…
Demain, on n’en aura plus que deux. Ça simplifie la gestion, les stocks, la planification. On pourra se concentrer sur un matériel plus fiable et plus standardisé.

Louise – Vous récupérez aussi des pièces sur les rames radiées ?

Anne-Sophie – Bien sûr. On appelle ça le « volant d’échange ». Dès qu’on peut récupérer une pièce compatible, on la garde : c’est économique, écologique, et surtout très utile.
Ça nous évite d’attendre une pièce neuve ou qu’un technicentre industriel la répare. Si on en a plusieurs sous la main, on gagne un temps fou.

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Retours clients et outils de signalement

Et les QR codes dans tout ça ?

Louise – Est-ce que les signalements des clients sont vraiment pris en compte ?

Anne-Sophie – Oui, complètement. Chaque signalement via QR code est reçu sous 24 heures. Ensuite, dès que la rame revient au technicentre, on va voir ce qu’il se passe.
Si c’est une intervention rapide, on la fait tout de suite. Sinon, on programme l’intervention dans notre outil interne. Donc oui, ça a un vrai impact.

Louise – Donc plus les clients signalent, plus vous gagnez en réactivité ?

Anne-Sophie – Exactement. Il y a des petits défauts qu’on ne peut pas forcément repérer nous-mêmes. On a des cycles de maintenance très réguliers, parfois tous les 37 jours. Sans signalement entre-temps, un problème peut passer inaperçu. Donc ces retours terrain sont précieux.

Des améliorations qu’on ne voit pas… mais qui comptent

Louise – J’imagine qu’il y a aussi des améliorations techniques qu’on ne voit pas forcément quand on monte à bord.

Anne-Sophie – C’est sûr. Par exemple, les vitres floues, c’est lié aux filaments chauffants : le verre se dégrade avec le temps et la chaleur. On teste plusieurs modèles, on en est à la 5e ou 6e version.
Autre exemple : les plans de ligne dynamiques. Huit rames tournent déjà avec une version test cet été. Si tout se passe bien, on déploiera sur tout le parc.

Louise – D’autres exemples ?

Anne-Sophie – On change aussi les électrovannes, ce qui fiabilisera le système de frein. Et on a adapté notre stratégie d’éco-stationnement. Avant, on coupait tout pour économiser l’énergie, mais en hiver, l’humidité s’infiltrait, et le matériel ne redémarrait pas. Résultat : suppressions.
Maintenant, en cas d’alerte météo (grand froid, forte chaleur), on ne coupe plus tout. On évite que le matériel souffre.

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En conclusion : vers plus de robustesse en 2026 ?

Louise – Pour conclure, j’aimerais bien connaître ton point de vue personnel. Est-ce que, selon toi, les clients ressentent déjà une amélioration ? Et qu’est-ce que tu entrevois pour la suite ?

Anne-Sophie – J’espère qu’ils la perçoivent. Depuis février, on tient le plan de transport côté matériel. Les suppressions pour cause matérielle ont fortement diminué.
Notre indicateur, c’est le nombre de rames arrêtées. On a droit à 17 rames immobilisées (Trappes inclus), et on est en dessous de ce seuil depuis plusieurs mois. Ce n’était pas arrivé depuis longtemps.

Louise – Et pour la suite ?

Anne-Sophie – En 2025, on a dû gérer l’urgence. En 2026, on veut construire une organisation robuste. On a retravaillé notre planning de maintenance, on retrouve un peu de sérénité.
Ça nous permet de mieux former les agents, de revoir les fondamentaux, de stabiliser. On reste fragiles – une vague de chaleur ou un redoux humide peut tout déséquilibrer – mais on avance.
Et surtout, avec un parc plus homogène, on pourra mieux absorber les aléas, sans que le client ne le ressente. C’est ça, notre objectif.

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Ce qu’il faut retenir de l’interview

Un technicentre sous pression, mais mobilisé
Le technicentre des Ardoines assure la maintenance de la majorité des rames du RER C. En 2024, il a été fortement sollicité en raison d’un enchaînement de contraintes : matériel vieillissant, échéances de maintenance, capacités limitées des ateliers, et des difficultés d’approvisionnement de pièces.

Une réorganisation profonde en cours
Un nouveau plan de maintenance a été mis en place fin 2024, permettant progressivement de résorber les retards. Objectif : anticiper au lieu de subir, en planifiant plus tôt, plus finement, et avec plus de souplesse.

Recrutement et formation : un défi permanent
Les métiers techniques de la maintenance souffrent d’un manque d’attractivité. Malgré des efforts en matière d’alternance, certaines équipes restent en sous-effectif. Mais l’engagement des agents, et parfois l’aide d’autres technicentres, permet de maintenir l’activité.

Vers un parc plus homogène
Les anciennes rames de la ligne C sont progressivement remplacées par celles du RER D, plus récentes. D’ici 2029, une simplification du parc matériel permettra de fiabiliser la maintenance et de gagner en robustesse.

Des retours clients précieux
Les signalements via QR code sont bien pris en compte et orientent les priorités d’intervention. Ils permettent de détecter certains défauts plus rapidement, en complément des cycles de maintenance programmés.

Je remercie Anne-Sophie pour le temps qu’elle m’a accordé. Mais aussi, vous, les voyageurs, qui avez pris le temps de déposer vos questions.
Nous avons essayé de répondre à un maximum de vos interrogations et mon interlocutrice a été d’une très grande transparence pendant nos échanges.

🔍 Si des points restent peu clairs, je vous invite à les partager en commentaires.

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3 commentaires pour “«  Le matériel n’est pas vétuste, mais il vieillit » : Anne-Sophie, répond à vos questions sur nos matériels roulants”

  1. Yyz

    J’ai une question. Le Technicentre des Ardoines ouvre et se ferme à quelle heure s’il vous plaît.

  2. GégèneCemoi

    Bravo la Team RERC
    Très bien cet interview
    hyper intéressant pour mieux comprendre le RERC
    bon courage à vous Tous et Toutes
    J’espère que les grincheux du transport en commun vont tout comprendre 😁

  3. Quentin

    Merci Louise pour cette entrevue riche d’informations.
    Et merci à tous les contributeurs dont certains étaient assez informés pour rentrer dans le lard.

    Le roulement des ZANI revenant BALI est très simple puisque ces rames passent grosso modo la nuit à Brétigny et la journée au garage de Tolbiac (qui n’est qu’à quelques kilomètres du technicentre). En revanche, le fait de les avoir trop souvent supprimés pendant toute l’année 2024 à cause de l’apprentissage du dépôt de Tolbiac puis pendant le début de l’année 2025 à cause du manque de rames a été très mal vécu par les riverains entre Juvisy et Brétigny, qui n’ont guère apprécié de devoir s’entasser dans des trains BOBA pour rentrer chez eux alors qu’ils étaient habitués à des trains directs entre BFM et Juvisy jusqu’en 2023.

    Il y a cependant quelques inexactitudes, qu’une simple consultation des pages Wikipédia (très bien tenues pour les rames en mutation ou en radiation) permet de corriger.
    — Les Z 5600 ont été mises en service entre 1984 et 1985 et la plus jeune a déjà soufflé ses 40 bougies ; les dernières à 6 voitures seront radiées en 2027, tandis que les dernières à 4 voitures seront radiées en 2028.
    — Les Z 8800 ont été mises en service entre 1986 et 1988 ; leur radiation suivra celle des Z 5600.
    — Malgré la mutation à date de 11 Z 20500 de la ligne D (dont au moins 8 à 10 déjà en service), une seule Z 5600, la 45T (qui a circulé comme rame expérimentale avant de prendre son numéro), a été radiée au printemps et les deux autres en livrée Transilien (33T et 51T, les plus anciennement rénovées) sont encore en circulation.
    Le gain en souplesse d’exploitation sera donc très progressif.

    En ce qui concerne le rafraîchissement, son absence sur bientôt plus de 70% du parc de la ligne C tient à des décisions prises dans les années 2010 lors des opérations à mi-vie : en effet les VB2N de la ligne J en ont été équipées, et les remorques des Z 5600 et des Z 8800 en sont dérivées (d’ailleurs les rames à 6 voitures comprennent deux rames VB2N). Mais à la différence des VB2N qui seront envoyées à la ferraille dès l’achèvement de la reprise de la ligne J5 par le RER E, et au rythme où avance (ou pas) l’appel d’offre Z2N-NG, les Z 20500 sont bien parties pour encore rouler en 2040 ! D’ici là, il est quasi-certain que nous subirons des canicules pires que celles que nous avons connues en plein été (août 2003, juillet 2006, juillet 2019) voire en période scolaire (juin 2019, septembre 2023, juin 2025).

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